
1723, année pivot pour Jean-Sébastien Bach

Il y a 300 ans, celui qui allait devenir la référence incontestée de la musique baroque quittait la ville de Köthen pour Leipzig. L’écriture des principales œuvres de Bach s’articule autour de cette période.
La période de Köthen
.En 1717, à l’âge de 32 ans, Jean-Sébastien Bach est nommé maître de chapelle, „cantor”, auprès du prince Léopold d’Anhalt-Köthen. Il s’installe avec sa femme Maria Barbara et leurs enfants dans la petite ville de Köthen, au centre du Saint-Empire.
Cette période sera très propice la création, le prince étant un amateur d’arts et de musique en particulier. Ayant été influencé par les grands maîtres italiens Torelli (1658-1709), Albinoni (1671-1751) et Vivaldi (1678-1741), ainsi que par le compositeur de cour français Jean-Baptiste Lully (1632-1687), Bach peut écrire ses Concertos Brandebourgeois, ses Concertos pour violon et une partie de ses Suites pour orchestre.
En 1720, Maria Barbara meurt, ce qui le bouleverse profondément. Il se remarie cependant en 1721 avec Anna Magdalena Wilcke, chanteuse réputée à la cour de Köthen. En 1723, le prestigieux poste de maître de chapelle de l’église Saint-Thomas de Leipzig est vacant. Bach, qui souhaite changer d’environnement, est sensible aux propositions du prince-électeur de saxe, Frédéric-Auguste „le fort”, qui est aussi roi de la République des Deux Nations.
La période de Leipzig
.Jean-Sébastien Bach et sa famille s’installent donc à Leipzig, l’une des principales villes du puissante électorat de Saxe, en Union personnelle avec la Pologne, et le compositeur y prend son nouveau poste de cantor. Il produit de nombreuses œuvres religieuses, dont la très connue Passion de Saint-Jean, écrite entre 1723 et 1724. Il finalisera aussi ses Suites pour orchestre.
Il prend aussi, en 1729, la direction du Collegium Musicum de la ville, fonction qui lui attire une grande renommée jusqu’à être invité par le roi de Prusse Frédéric II. Néanmoins, cette renommée ne se diffusera pas dans un premier temps dans le reste du pays et en Europe. S’il inspira Mozart (1756-1791) et Beethoven (1770-1827) entre autres, il faudra attendre que le compositeur soit redécouvert par Félix Mendelssohn (1809-1847) au XIXème siècle dans le contexte du mouvement romantique.
Bach meurt en 1750, à Leipzig. Il laisse une œuvre titanesque et quatre de ses fils deviendront eux-mêmes compositeurs : Wilhelm Friedemann, Carl Philipp Emanuel, Johann Christoph Friedrich et Johann Christian.
Ainsi, nous commémorons en 2023 cette année charnière pour le virtuose du baroque, qui fut le symbole de la reconnaissance de son talent et de son entrée dans une nouvelle dimension de composition : ses dernières années à Köthen furent complétées et sublimées par ses premières années à Leipzig.
Les Suites pour orchestre de Bach, un monument du baroque
.Les dates d’écriture de ces œuvres sont très peu connues. Certaines ont été écrites à Köthen, d’autres à Leipzig. Elles ont cependant été compilées dans la seconde moitié des années 1720.
Les suites pour orchestre sont aussi appelées „suites françaises”, car leur forme a été codifiée au début du XVIIIème siècle en France. Elles s’inspirent du ballet français du XVIIème siècle et doivent beaucoup à l’influence de Jean-Baptiste Lully. C’est lui qui établit les normes du style, avec une ouverture „française” suivie d’un mouvement plus rapide. De nombreux musiciens allemands se déplaçaient à Paris afin d’assister aux danses élaborées par Lully et les suites d’orchestre se répandirent outre-rhin. Bach fut l’un de ceux qui rendirent hommage à Lully de cette manière.
En particulier la première, la Suite No. 1 en do majeur (BMV 1066). Prévue pour deux hautbois et deux violons, elle présente une remarquable variété de formes avec une danse italienne Forlane en quatrième mouvement.
La deuxième, la Suite No. 2 en si mineur (BMV 1067), se distingue par sa Polonaise et par un Rondeau en gavotte. La Sarabande est aussi notable (à ne pas confondre avec la célébrissime Sarabande de Haendel, troisième mouvement de sa suite en D mineur). La suite est écrite pour flûte traversière et violons.
La Suite No. 3 en ré majeur (BMV 1068) est sans doute la plus connue. Son orchestration est plus riche que les précédentes (trompettes, timbales, hautbois, violons), ce qui s’entend dès l’Ouverture. L’Air, l’un des plus grands chefs d’œuvre de l’époque baroque, se différencie du reste de la suite car il est réservé aux instruments à corde.
.La Suite No. 4 en ré majeur (BMV 1069) est similaire à la No. 3 de par les instruments utilisés, mais est plus dansante et s’achève par une Réjouissance qui clôture proprement cette œuvre de Bach.