David Cameron insiste pour davantage aider l’Ukraine

David Cameron

Le Secrétaire d’État britannique aux Affaires étrangères et ancien Premier ministre, David Cameron, publie une tribune dans laquelle il appelle à stopper la Russie en Ukraine.

Lettre de David Cameron aux Américains

.L’ancien Premier ministre britannique David Cameron vient de publier un article dans le quotidien américain „The Hill”, spécialisé dans les questions de politique institutionnelle et internationale aux Etats-Unis. Son texte s’adresse principalement aux parlementaires de Washington, qui sont en train de négocier pour faire passer un paquet d’aide de presque 100 milliards de dollars pour l’Ukraine, Israël et Taïwan.

Une intense passe d’armes a en effet lieu au Sénat et à la Chambre des représentants entre démocrates et républicains, et même au sein des deux partis. Une frange des démocrates s’oppose à fournir une aide à Israël, tandis qu’une partie non négligeable des républicains souhaite obtenir un compromis sur l’immigration.

La pression migratoire a rarement été aussi forte à la frontière sud des Etats-Unis. Rien qu’en décembre 2023, 300 000 clandestins l’ont franchie. Des scènes dantesques se sont déroulées au Texas, où la Garde nationale déployée par le gouverneur Greg Abbott et les services fédéraux ont failli s’affronter autour des barrières visant à empêcher les migrants illégaux venus du Mexique de pénétrer sur le territoire américain.

L’aide militaire à l’Ukraine risque donc d’être une victime collatérale des tensions pré-électorales au Congrès de Washington. C’est pour essayer d’éviter cela que David Cameron écrit que „le soutien à l’Ukraine est très important pour la sécurité du Royaume-Uni et de l’Europe” et qu’il rappelle le „partenariat pour la défense de la liberté” qui lie son pays aux Etats-Unis. Il l’illustre avec des exemples personnels, évoquant par exemple son grand-père qui a participé au débarquement de Normandie. Il met l’accent sur les causes communes du Royaume-Uni et des Etats-Unis : le soutien à Israël après l’attentat terroriste du Hamas le 7 octobre 2023, la liberté de navigation dans la mer Rouge face aux milices houties et le combat de l’Ukraine pour sa souveraineté.

L’Occident contre les tyrans ?

.Le Secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères décrit les efforts européens consentis en faveur de l’Ukraine : „Les Européens ont fourni plus de la moitié de l’aide à l’Ukraine, avec une aide totale de 170 milliards de dollars à ce jour. L’Union européenne vient de se mettre d’accord sur un plan de financement pluriannuel de 50 milliards d’euros. L’Allemagne a doublé son aide militaire à l’Ukraine le mois dernier. Et la Grande-Bretagne est devenue le premier pays à signer un accord de sécurité bilatéral avec Kiev”.

Il indique que cette aide a permis aux Ukrainiens de lutter contre l’armée russe d’invasion, mettant à mal les capacités militaires de Moscou. „C’est Vladimir Poutine qui devrait craindre l’échec”, écrit-il, en pointant les faiblesses de l’Etat russe. Pourtant, David Cameron est conscient de la menace exercée par Moscou et de sa volonté d’”étendre son empire simplement en surpassant l’Occident”.

Contre cette menace, il appelle à s’unir et à voter le paquet d’aide. Pour lui, il est hors de question de laisser l’invasion de l’Ukraine impunie. Ca serait une preuve de faiblesse et un signal envoyé aux tyrans du monde entier, notamment la Chine et l’Iran, qu’ils peuvent faire ce qu’ils veulent. Il compare la situation actuelle à celle des années 1930 : „Je ne veux pas que nous montrions la faiblesse affichée contre Hitler dans les années 1930. Il est revenu pour plus, nous coûtant beaucoup plus de vies pour arrêter son agression”. Pour lui, le recul de l’Occident vis-à-vis de la Russie en 2008 et 2014, et son relatif immobilisme depuis 2022, nous affaiblissent. Il estime que la rhétorique du Kremlin sur l’”escalade” n’est que du bluff, et que l’on peut armer l’Ukraine sans craindre pour la sécurité du monde, bien au contraire.

David Cameron conclut sa lettre sur des mots forts: „Nous combattons l’agression. Nous défendons la liberté. Nous restons aux côtés de nos amis. Nous montrons à ce monde dangereux et incertain que nous sommes inflexibles dans notre volonté. Et nous gagnons”.

„L’Ukraine ou le refus de l’assujettissement impérial”

.Le professeur Andrzej Nowak, historien et soviétologue, décrit, pour „Wszystko co Najwazniejsze”, les relations historiques de l’Ukraine avec son entourage proche:

„La décision de Bohdan Khmelnytsky, figure emblématique du plus grand d’une série de soulèvements cosaques, de conclure une union avec Moscou-Russie en janvier 1654 a été désastreuse. Khmelnytsky s’attendait à ce que son résultat soit un contrat d’égal à égal, garantissant la pleine autonomie à l’Ukraine, mais le légat du tzar lui a vite fait comprendre la différence qu’il y avait entre la culture politique moscovite et celle de la République : « Dans le tsarisme de Moscou, ce sont ses sujets qui prêtent serment de servir le grand tzar, mais prêter serment en son nom n’a jamais eu et n’aura jamais lieu… »”.

„Khmelnytsky n’a pas rompu les liens avec Moscou, mais une grande partie des cosaques a préféré retourner au berceau de la République ou s’allier avec la Turquie ou même la Suède pour ne pas tomber sous le joug despotique des tzars. Cela n’a pas empêché la Russie de mettre à son profit ce moment de crise. La République, elle, a tenté de conclure une nouvelle union égalitaire avec les cosaques (l’Ukraine) en 1656, à Hadziacz, mais n’a pas réussi à la faire durer”.

„Sur le conflit entre les cosaques et la noblesse polonaise, la Russie a bâti les bases d’un premier grand succès dans son expansion à l’Ouest : la conquête de la partie orientale de l’Ukraine en 1667″.

„Mais les cosaques n’ont pas oublié leur tradition de liberté : ils l’ont réclamée au XVIIIe siècle (les symboles de ce mouvement restent les hetmans Ivan Mazepa et son successeur Filip Orlik), et après la suppression de leur autonomie par Catherine II, ils n’ont eu de cesse de faire renaître leur identité nationale. De même, les Polonais et les Lituaniens n’ont jamais accepté le fait d’être privés par la Russie, la Prusse et l’Autriche de leur indépendance. Et, depuis la fin du XVIIIe siècle jusqu’en 1918, ils ont combattu – par le fer et par la plume – pour la recouvrer”.

„Les Ukrainiens n’ont pas eu cette chance. Ils ont dû attendre 1991 et le démantèlement de l’empire soviétique pour voir renaître leur État souverain. Tout au long de ces années, plus d’une fois ils ont lutté contre les Polonais, mais en fin de compte, la tradition commune de liberté, le refus de l’assujettissement impérial, aussi le souvenir des sacrifices subis face au système d’oppression d’abord tzariste, puis soviétique, se sont avérés plus forts. Polonais, Ukrainiens et Lituaniens – tout comme les autres nations de cette partie de l’Europe – qui ne veulent être ni « le monde russe » de Poutine, ni des pions dans le jeu des puissances européennes, laissent entendre leur voix : un veto tout en fierté lancé par les nations libres et solidaires face aux tentatives de renouveau de la domination impériale sur l’Europe de l’Est”.

Nathaniel Garstecka

Materiał chroniony prawem autorskim. Dalsze rozpowszechnianie wyłącznie za zgodą wydawcy. 15 lutego 2024