La Via Carpatia - un „don du ciel”

Via Carpatia

Ce projet d’autoroute européenne nord-sud doit relier la Lituanie à la Grèce. Pour Athènes, la construction de la Via Carpatia est un „projet très important”.

La Via Carpatia, un projet majeur

.Lancée par le Président polonais Lech Kaczynski, l’idée de route unique liant les pays baltes à la Grèce date de 2006 et a gagné en crédibilité après l’entrée de la Bulgarie et de la Roumanie dans l’Union européenne. Les pays concernés voient dans ce projet l’opportunité de renforcer leurs liens économiques et d’accélérer leur intégration européenne.

Prolongeant la Via Baltica déjà existante (reliant les trois pays baltes à la Pologne), la Via Carpatia traversera l’est de la Pologne par Bialystok, Lublin et Rzeszow. Le tronçon slovaque comportera 130 kilomètres et passera par Kosice tandis que la partie hongroise en comptera 230 en passant par Debrecen. La Via Carpatia se confondra ensuite avec la route européenne 79 : Roumanie, Bulgarie et enfin Grèce jusqu’à Thessalonique. Plusieurs branches secondaires sont prévues, dont une qui relierait l’Ukraine à la Via Carpatia.

En 2022, le projet a été inclus dans le réseau transeuropéen de transport, qui a pour but d’améliorer la qualité et la vitesse des échanges entre les Etats membres. Il doit devenir par ailleurs le principal axe autoroutier nord-sud d’Europe centrale et orientale.

Un „don du ciel”

.Dans un entretien avec la „Polska Agencja Prasowa”, le professeur Grigoris Zarotiadis de l’Univsersité Aristote de Thessalonique livre le point de vue grec :

„Pour la Grèce, la liaison Via Carpatia est actuellement l’investissement routier international le plus important. Il nous permettra l’accès aux marchés d’Europe du nord et d’Europe de de l’est. Par ailleurs, le projet sera une opportunité de renforcer nos relations avec les pays balkaniques avec lesquels nous avons des liens historiques”.

Il ajoute : „Pour Thessalonique, qui est un important centre économique et logistique, la Via Carpatia est un véritable don du ciel. Le fragment de route devant atteindre le port est cependant encore en construction”.

„Cette nouvelle route pourra faire concurrence à l’axe nord-sud déjà existant, mais qui passe par la Macédoine du nord et la Serbie”, précise l’universitaire.

L’Initiative des Trois Mers

.Dans un article écrit pour „Wszystko co Najwazniejsze”, Horia-Victor Lefter, enseignant d’histoire à Bordeaux et spécialiste de la littérature d’Europe centrale, évoque ce projet fondamental de coopération des pays d’Europe centrale et orientale :

„Depuis la chute du Rideau de Fer, l’Europe centrale tente de trouver sa place dans un système est-ouest en cours de redéfinition : d’un côté, la Russie dont elle essaie de se protéger, de l’autre, l’Union européenne (UE) et l’OTAN auxquelles elle a adhéré. Après avoir posé les premiers jalons en constituant en 1991 avec la Hongrie, la Slovaquie et la Tchéquie, le Groupe de Visegrád (V3 puis V4), la Pologne, s’est alliée avec la Croatie et la Roumanie pour étendre, en 2016, ce noyau à huit autres États et former l’Initiative des Trois Mers (IdTM). Mais, dans une Europe à géométrie variable, l’Europe centrale peut-elle, à travers ce nouveau forum, faire entendre sa voix ?”

„Un projet ancien. Au regard de son extension, l’IdTM n’est pas sans rappeler le projet d’un Intermarium ou Międzymorze (Entre-Mers) au sein duquel Jozef Pilsudski avait cherché à fédérer, après la Première Guerre mondiale, la plupart des États issus des Empires austro-hongrois, ottoman et tsariste. Cependant, le format actuel correspond davantage à l’Europe médiane définie par Czesław Miłosz dans Une autre Europe. Bien aue l’IdTM dépasse les limites communément admises de l’Europe centrale, ces États, foyer de la culture yiddish, partagent une histoire commune, ayant été pendant des siècles sous le contrôle des trois puissances susmentionnées tout en ayant essayé de se dresser en rempart de la chrétienté contre l’expansion musulmane. Bien que la majorité des langues de cette région relève du groupe balto-slave, l’allemand fut la langue des échanges. Mais, si au XIXe siècle, le polonais fut la langue de la culture à Kyiv (Mikola Riabtchouk), les figures éminentes de la culture roumaine à la même époque, pourtant pays de langue romane, ont fait leurs études à Berlin et Vienne et été influencées par la philosophie allemande (Mihai Eminescu, dernier grand romantique de l’Europe ou, Paul Celan, le plus grand poète de langue allemande d’après-guerre).”

„Se prendre en main. Le moyen pour l’Europe centrale, cet « élément vital de l’Europe », selon la présidente croate, Kolinda Grabar-Kitarović, de se prendre en main est la création d’un fond d’investissement auquel la Pologne et la Roumanie ont déjà contribué avec plus 500 millions d’euros. Soutenu par les États-Unis qui ont promis de participer à hauteur d’un milliard de dollars, le projet devrait permettre, selon James Jones, ancien conseiller de Barack Obama, de « véritablement connecter et parachever l’Europe ». Mais les besoins de la région s’élèvent à plus de 570 milliards d’euros. En effet, si l’Europe centrale dispose des connexions est-ouest nécessaires, ce fond devra servir à améliorer les infrastructures énergétiques, numériques et de transport afin de mettre en place un axe nord-sud, présenté par le président polonais comme le cœur de cette coopération. Plusieurs projets sont déjà soutenus par l’Initiative : l’autoroute Via Carpathia qui relie Klaipeda à Thessalonique et les infrastructures pour le gaz naturel liquéfié avec des terminaux portuaires en Pologne et en Croatie.”

Nathaniel Garstecka

Materiał chroniony prawem autorskim. Dalsze rozpowszechnianie wyłącznie za zgodą wydawcy. 12 lipca 2023