9 et 10 novembre 1938, la nuit de Cristal

Obchody rocznicy „nocy kryształowej” w Niemczech w czasie wojny w Izraelu

Ce pogrom est considéré comme une étape supplémentaire vers la Shoah. La mémoire de la nuit de Cristal reste vive aujourd’hui, en particulier dans le contexte des nouvelles violences antisémites dans le monde occidental.

L’antisémitisme dans l’Allemagne nazie

.Depuis l’arrivée au pouvoir d’Adolf Hitler en 1933, la situation des Juifs d’Allemagne n’a fait que se détériorer d’année en année. Pour autant, la haine à leur égard n’est pas nouvelle dans ce pays. Le Moyen âge a été le théâtre de nombreuses persécutions et expulsions dans le monde germanique, ce qui a entrainé notamment la croissance constante de la communauté juive de Pologne.

La modernité ne voit pas disparaître l’antisémitisme, loin de là. La période de la Réforme a été émaillée d’incidents antijuifs, puis le XIXème siècle et l’idéologisation du phénomène par les mouvements nationalistes et révolutionnaires. A la fin de la Première Guerre mondiale, les Juifs sont accusés, entre autres, d’avoir porté à l’Allemagne un „coup de poignard dans le dos”.

Dès sa naissance, le parti nazi porte des idées antisémites, évoquant par exemple la „pureté de la race allemande”. Il ne s’agit pas que de marketing politique. Une fois au pouvoir, Hitler met en application ses idées. Une politique progressive de discriminations est instaurée. Cela commence par des agressions physiques, commises par les SA, puis par des campagnes de boycott et par les premières lois visant à bannir les Juifs de la vie publique.

En 1935, ce sont les lois de Nuremberg sur la citoyenneté („un citoyen du Reich est uniquement une personne de sang allemand”) et sur la „protection du sang et de l’honneur allemands”. Elles interdisent par exemple les mariages „entre Juifs et citoyens de sang allemand” et surtout définissent qui est Juif et qui ne l’est pas sur des critères d’ascendance.

Les persécutions ralentissent en 1936 dans le cadre des Jeux Olympiques de Berlin mais reprennent immédiatement après et l’année 1938 est particulièrement critique.

La nuit de Cristal, une étape vers la Shoah

.Le 7 novembre 1938, un secrétaire de l’ambassade allemande à Paris, Ernst von Rath, est assassiné dans son bureau par un jeune Juif polonais, Herschel Grynszpan. La famille de Grynszpan venait d’être expulsée d’Allemagne dans le cadre de la „Polenaktion” et la Pologne ne souhaitait pas accueillir et aider ses ressortissants.

Les autorités allemandes décident, en guise de représailles, de lancer une campagne massive d’agressions contre les Juifs. Dès le 9 novembre, les structures régionales et locales du parti mobilisent leurs militants et leurs bataillons paramilitaires et publient des listes de cibles à attaquer : simples Juifs, responsables communautaires, synagogues, magasins, établissements scolaires et culturels…

Sur tout le territoire du III Reich et pendant 24h de la soirée du 9 novembre à celle du 10, de véritables pogroms ont lieu, auxquels s’associent souvent les citoyens ordinaires et les paysans. Les synagogues sont brûlées et détruites, les boutiques sont pillées, leurs vitrines brisées (ce qui donnera son nom à l’événement : „Kristallnacht”, nuit de Cristal), les attaques physiques et les humiliations se multiplient. Des milliers de Juifs sont arrêtés et envoyés dans les camps de concentration, leurs biens sont confisqués („aryanisés”).

Le bilan de la nuit de Cristal est tragique : cent Juifs massacrés, 7 500 magasins détruits, 12 000 pillés, près de 300 synagogues endommagées dont presque cent rasées. Entre 20 et 30 000 Juifs ont été déportés, notamment à Dachau, Buchenwald et Sachsenchausen, des centaines y mourront durant les mois suivants.

Cette violence antisémite débridée fera de la nuit de Cristal une étape fondamentale vers l’extermination totale des Juifs d’Europe. La passivité voire la complicité d’une grande partie des citoyens allemands, le silence des autorités religieuses et de des pays occidentaux, conforteront les dirigeants nazis dans leur volonté génocidaire. Les Juifs sont définitivement mis à l’écart de la société allemande, beaucoup sont expulsés ou poussés à l’émigration. A la veille du déclenchement de la guerre, les Juifs d’Allemagne sont totalement démunis, vulnérables et terrorisés. La prochaine étape est l’exportation de cette situation aux pays occupés ou collaborateurs, et enfin l’extermination pure et simple.

En 2023, les émeutes et les crimes antisémites en Allemagne, en France ou aux Etats-Unis rappellent les événements de la nuit de Cristal, tout comme la passivité des gouvernements. Les Juifs doivent à nouveau craindre pour leur sécurité.

„La Shoah – le crime que le monde entier a préféré ignorer”

.Marcin Czepelak, ambassadeur de Pologne aux Pays-Bas, décrit, dans un article paru dans „Wszystko co Najwazniejsze”, l’inaction de l’Occident face à l’extermination des Juifs d’Europe par l’Allemagne nazie :

„La réunion de Wannsee fut diabolique. Depuis l’invasion de la Pologne en septembre 1939, les Allemands ont entamé dans les territoires conquis des persécutions de la population juive, mais leur agression de l’Union soviétique, en juin 1941, s’est soldée par une brutalité encore plus grande et un caractère encore plus massif de leur politique antijuive. En août, les Einsatzgruppen ont massacré 24 000 Juifs à Kamenets-Podolski ; mi-septembre, début octobre plus de 30 000 Juifs ont été assassinés à Babi Yar, dans les environs de Kiev ; les exécutions du 30 novembre et du 8 décembre ont entraîné plus de 30 000 victimes juives du ghetto de Riga. Parallèlement, en automne, les Allemands ont commencé la construction de premières usines de la mort : les camps d’extermination à Sobibor et à Bełżec. C’est entre autres dans ces camps qu’ont été acheminés les Juifs venant de toute l’Europe pour y être exterminés dans les chambres à gaz. Tout cela s’est passé dans un silence absolu de la communauté internationale”.

„Parallèlement, l’État clandestin polonais a entrepris des actions visant à informer la communauté internationale sur le tragique sort des Juifs. À l’automne 1942, est arrivé à Londres Jan Karski, le courrier de l’État clandestin auteur de rapports sur la situation de la population juive, en particulier sur son extermination par les Allemands. Pour collecter des informations crédibles, Karski avait pénétré secrètement dans le ghetto de Varsovie et puis, dans un uniforme d’officier allemand, dans le camp transitoire d’Izbica. Ses rapports ont été transmis aux gouvernements britannique et américain, sans pour autant suscité un intérêt particulier. Seul le New York Times du 25 novembre 1942 a publié, en page 10, un court texte sur le plan allemand d’extermination de 250 000 Juifs polonais. Rien d’autre”.

„Les rapports de Jan Karski ont trouvé leur confirmation dans les relations ultérieures de Witold Pilecki de 1943. En volontaire, Pilecki s’est fait déporté au camp Auschwitz-Birkenau pour y organiser un mouvement de résistance et rédiger un rapport sur les crimes qui y étaient commis. D’autres témoignages concordants étaient à trouver dans les relations de deux Juifs qui ont fui le camp en avril 1944 : Rudolf Vrba et Alfred Wetzler”.

„Mais quand en 1942 le gouvernement polonais en exil en a appelé à entreprendre des actions visant à stopper l’extermination des Juifs, sa voix a rencontré un manque de réaction. Les architectes du crime planifié à Wannsee pouvaient s’abriter derrière le mur du silence”.

Nathaniel Garstecka

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