Election présidentielle de 2025 en Pologne – quatrième débat

C’est le quatrième débat présidentiel à ce tenir en deux semaines et le premier à réunir l’intégralité des candidats enregistrés. La campagne électorale s’apprête à entrer dans sa dernière phase.
Présidentielle 2025 en Pologne
.Le premier tour de l’élection présidentielle polonaise se tiendra le dimanche 18 mai 2025. Le président sortant, Andrzej Duda (PiS, conservateurs), achève son second mandat et ne peut pas se représenter. Le second tour aura lieu le dimanche 1er juin.
La moyenne des sondages indique toujours que Rafal Trzaskowski (KO, centriste progressiste), candidat du camp gouvernemental, est en tête du premier tour avec 34% des voix, suivi de Karol Nawrocki (soutenu par le PiS, conservateur) avec 29%. Le podium est complété par Slawomir Mentzen (Konfederacja, nationaux libertaires), qui réunirait 15% des suffrages. Szymon Holownia (PL50, centriste) est donné en quatrième position (6%). Les autres candidats se situent sous les 5%. Selon les sondages, Rafal Trzaskowski emporterait le second tour (entre 53% et 56%) quel que soit son adversaire. Cependant, son avance a tendance à rétrécir depuis quelques semaines, ce qui permet à ses concurrents de maintenir l’espoir.
Après les deux débats organisés par la chaîne de télévision TV Republika et celui organisé par la télévision publique TVP, c’est au tour du média Super Express d’inviter les candidats à échanger. L’émission du 28 avril 2025 a été diffusée depuis le studio de la chaîne Youtube de Super Express, à Varsovie.
Le quatrième débat
.Le format de cette quatrième confrontation était différent de celui des précédentes. Les candidats ont été amenés dès le début à se poser des questions libres entre eux. Grzegorz Braun, qui s’était déjà illustré par ses actions antisémites, a échangé des propos anti israéliens avec l’un des candidats de gauche Adrian Zandberg, tout en refusant de condamner ouvertement la guerre que mène Vladimir Poutine en Ukraine. Karol Nawrocki, pris à partie par le même Adrian Zandberg, a mis l’accent sur sa volonté de rendre la fiscalité «simple et juste», en défendant l’héritage des gouvernements conservateurs (2015-2023).
Plusieurs passages ont mis en scène des confrontations entre représentants de la coalition de centre-gauche au pouvoir, comme entre Rafal Trzaskowski et Szymon Holownia, l’un accusant l’autre d’être responsable des échecs du gouvernement. Marek Jakubiak, questionné par Szymon Holownia sur l’Union européenne, a proposé de laisser les citoyens s’exprimer sur l’avenir de la Pologne au sein de l’UE. Slawomir Mentzen s’est pris en photo avec Szymon Holownia, puis a répété les principaux points de son programme, notamment le rejet du pacte migratoire européen et du pacte vert.
Slawomir Mentzen a rappelé à Rafal Trzaskowski ses propos passés favorables à l’immigration illégale. Ce dernier a évité l’accusation en rejetant la faute sur les conservateurs qui ont cédé le pouvoir en 2023. M. Mentzen a enfoncé le clou, informant que le gouvernement centriste actuel menaçait les communes polonaises de leur couper les subventions si elles s’opposaient à l’ouverture de centres pour migrants. Le candidat de la Konfederacja a ensuite pointé les contradictions de Szymon Holownia sur l’adoption de l’euro, ce à quoi le président de la Diète s’est contenté de répondre: «les temps ont changé».
Joanna Senyszyn a interpellé Karol Nawrocki sur un éventuel retour du service militaire. Le candidat conservateur a précisé qu’il était partisan d’un service sur la base du volontariat. «L’armée polonaise doit être forte, compter 300 000 soldats et compter sur des alliés fiables», a-t-il ajouté.
Le journaliste Krzysztof Stanowski a interrogé Rafal Trzaskowski sur l’immigration illégale et sur les revirement de celui-ci une fois son camp arrivé au pouvoir. Une fois de plus, le candidat progressiste a éludé la question, préférant attaquer les conservateurs du PiS. Rafal Trzaskowski a déclaré vouloir autoriser les femmes à avorter sans condition jusqu’à la douzième semaine de grossesse et s’est montré favorable à l’instauration du PACS. M. Stanowski a aussi dénoncé les positions pro russes de Maciej Maciak, candidat demandant ouvertement à désarmer le pays face à la menace orientale et louant publiquement «les qualités» de Vladimir Poutine.
Karol Nawrocki, répondant à une provocation de Grzegorz Braun, a déclaré souhaiter accélérer les expulsions d’immigrés illégaux mais a témoigné de sa solidarité à l’égard des réfugiés ukrainiens fuyant l’invasion russe et souhaitant s’intégrer à la société polonaise. Interrogé sur l’avortement en cas de viol par la candidate de la gauche Magdalena Biejat, Slawomir Mentzen a pointé l’augmentation des viols consécutive à l’immigration massive arabo-musulmane et africaine dans les pays d’Europe occidentale.
Conclusions du débat
.Le format adopté par Super Express a favorisé les confrontations directes entre candidats, sans intervention des journalistes et sans sujets imposés. Il en est ressorti une certaine cacophonie et une inégalité flagrante de temps de parole car certains candidats étaient davantage sollicités que d’autres.
Deux grands duels étaient scrutés de près: celui de Rafal Trzaskowski avec Karol Nawrocki, soit la finale annoncée par les sondages, et celui de Slawomir Mentzen avec Szymon Holownia pour la troisième place. Les deux favoris ont été jugés sur leur gestuelle et leur attitude globale, tandis que le second duel a produit davantage d’étincelles, témoignant de l’inimité entre les deux hommes politiques.
Cependant, les premiers débats ayant été si riches en rebondissements et en surprises que celui-ci semblait naturellement plus banal et convenu. Seules dénotaient les outrances de Grzegorz Braun, personnage mettant en scène un complotisme maladif et compulsif. Ont marqué aussi les déclarations ouvertement pro russes de Maciej Maciak et les inconstances de Rafal Trzaskowski, sur l’immigration, et de Szymon Holownia, sur l’adoption de l’euro.
Alors que les sondages se resserrent, chaque erreur, chaque dérapage, chaque signe de nervosité d’un candidat sera monté en épingle et récupéré politiquement par le camp adverse. C’est l’une des raisons de la perte de vitesse du candidat progressiste Rafal Trzaskowski ces dernières semaines, ou de celle du national-libertaire Slawomir Mentzen. Ce quatrième débat servira aux Polonais à se faire une opinion plus précise, en attendant les deux suivants: le mai 2025 sur TV Republika et le 12 mai sur TVP.
Nathaniel Garstecka