Présidentielle Pologne 2025. Qui va gagner?

Le candidat progressiste Rafal Trzaskowski arrive en tête du premier tour de l’élection présidentielle polonaise avec 32% des voix. Le conservateur Karol Nawrocki accède aussi, grâce à ses 30%, au second tour, qui se tiendra le dimanche 1er juin 2025.
Rafal Trzaskowski en tête au premier tour
.Les sondages de sortie des urnes publiés ce dimanche 18 mai 2025 à 21h ne laissent aucune place au doute. Après 2005, 2010, 2015 et 2020, le second tour de l’élection présidentielle polonaise verra s’affronter un candidat soutenu par la PO (Plateforme Civique, PPE) à un candidat soutenu par le PiS (Droit et Justice, CRE). Afin de désigner le successeur du conservateur Andrzej Duda au Palais présidentiel, les Polonais auront à choisir entre le progressiste Rafal Trzaskowski (31% selon le sondages exit poll IPSOS, 32% selon le sondage OGB) et le conservateur Karol Nawrocki (29% IPSOS, 30% OGB). Le second tour aura lieu le dimanche 1er juin 2025.
La troisième place a été attribuée à Slawomir Mentzen de la Konfederacja (Confédération, ENS), qui a obtenu 15% des voix, ce qui constitue le plus haut score jamais réalisé par son parti. Viennent ensuite l’anticonformiste de droite Grzegorz Braun avec 6%, Adrian Zandberg (gauche d’opposition) avec 5%, le président de la Diète Szymon Holownia (PL50, Renew) avec 5%, Magdalena Biejat (gauche gouvernementale) avec 4%. Les autres candidats n’ont pas atteint les 4%. Ces données seront à affiner dans la journée de lundi 19 mai et les résultats définitifs et officiels seront connus le lendemain.
Sondage exit poll IPSOS pour TVP Info :
Rafal Trzaskowski – 31%
Karol Nawrocki – 29%
Slawomir Mentzen – 15,5%
Grzegorz Braun – 6%
Adrian Zandberg – 5%
Szymon Holownia – 5%
Magdalena Biejat – 4%
Sondage exit poll OGB pour TV Republika :
Rafal Trzaskowski – 32%
Karol Nawrocki – 30%
Slawomir Mentzen – 14%
Adrian Zandberg – 6%
Grzegorz Braun – 5%
Szymon Holownia – 5%
Magdalena Biejat – 4%
Analyse du scrutin
.Cette élection présidentielle revêt une importance cruciale pour le paysage politique polonais. Le premier ministre Donald Tusk, au pouvoir depuis décembre 2023, compte obtenir le dernier maillon lui manquant afin de verrouiller le système au bénéfice de son parti. Il s’agit d’un véritable test pour celui qui est empêché d’appliquer son programme progressiste par l’opposition du président conservateur Andrzej Duda. Une défaite de Rafal Trzaskowski au second tour pourrait aggraver les tensions au sein de la coalition dirigeante de centre-gauche, dont plusieurs candidats se sont présentés à cette élection présidentielle, ce qui aurait pour potentielle conséquence un éclatement du gouvernement. Par ailleurs, la position de Donald Tusk sur l’arène internationale en pâtirait, au moment où le premier ministre tente un rapprochement de la Pologne avec les institutions européennes au détriment de l’alliance américaine.
Pour les conservateurs du PiS, la situation est tout autre. Après avoir perdu le pouvoir en 2023, puis son statut de premier parti de Pologne en 2024, la formation menée par Jaroslaw Kaczynski se cherche un second souffle. La campagne douteuse menée par le candidat de la PO-KO Rafal Trzaskowski a fait naître l’espoir de conserver un bastion garantissant le pluralisme du pouvoir et empêchant la constitution d’un monopole nuisible à l’état de droit en Pologne. Karol Nawrocki, après un début de campagne laborieux, a su rattraper son retard et inquiéter le maire de Varsovie, que les sondages ont longtemps donné confortable vainqueur. Son score est donc plutôt encourageant. Cependant, une défaite au second tour mettrait en danger le camp conservateur, menacé par les progressistes de se voir couper les subventions publiques.
La lutte pour la troisième place n’est pas anodine. Le relativement bon score obtenu par Slawomir Mentzen pourrait rendre son parti, la Konfederacja, incontournable après les prochaines législatives de 2027. Il est manifeste que le centriste Szymon Holownia, président de la Diète polonaise et allié de Donald Tusk, a échoué à incarner une troisième voie hors des deux grands partis traditionnels (PiS et PO-KO). L’électorat cherchant à «briser le bipartisme» s’est donc reporté sur les nationaux-libertaires de la Konfederacja et sur la gauche. A gauche, d’ailleurs, le duel, quasi personnel, opposant Magdalena Biejat, membre de la coalition gouvernementale, à l’anticonformiste Adrian Zandberg, s’est soldé par une victoire du second.
Présentation des finalistes
.Rafał Trzaskowski – Il occupe la vice-présidence de la Plateforme Civique (PO, centre), formation dominante au sein de la coalition de centre-gauche qui gouverne la Pologne depuis fin 2023. Ancien eurodéputé de 2009 à 2014, il fut ministre de l’Administration publique entre 2013 et 2014, puis chargé des Affaires européennes jusqu’en 2015. Élu à la tête de la mairie de Varsovie en 2018, il a été reconduit dans ses fonctions en 2024. Rafal Trzaskowski a également été candidat à la présidentielle de 2020, qu’il perdit de peu au second tour face à Andrzej Duda, avec 49 % des suffrages.
Son programme comporte des engagements en faveur des droits à l’avortement et au mariage pour tous, l’arrêt des subventions publiques aux institutions religieuses, un rapprochement diplomatique avec Paris et Berlin dans le cadre européen, au détriment des liens privilégiés avec Washington. Il défend une intégration plus poussée dans l’UE, l’adoption de l’euro «dès que possible», la poursuite de la transition écologique conformément au Pacte vert de l’UE, ainsi que le maintien d’un soutien fort à l’Ukraine.
Karol Nawrocki – Historien de formation, il a dirigé le musée de la Seconde Guerre mondiale à Gdańsk entre 2017 et 2021, avant d’être nommé à la tête de l’Institut de la Mémoire Nationale (IPN) cette même année. L’institution se consacre à l’étude des crimes des régimes nazi et communiste en Pologne. À ce poste, il a lancé une vaste entreprise de retrait des symboles soviétiques de l’espace public, ce qui lui a valu d’être inscrit par le Kremlin sur la liste noire des «ennemis du régime».
Initialement indépendant, Nawrocki a été proposé pour l’élection présidentielle de 2025 par un collectif d’universitaires et de personnalités civiles, avant de recevoir le soutien explicite du PiS (Droit et Justice), le parti conservateur dont est issu le président sortant Andrzej Duda. Son programme prolonge les grandes orientations du PiS : alliance stratégique avec les États-Unis, refus du fédéralisme européen et de l’abandon des souverainetés nationales, poursuite des projets d’infrastructure majeurs comme le CPK (nouvel aéroport central) et du réarmement national, rejet du Green Deal et du pacte migratoire, défense du zloty contre l’euro, opposition aux réformes sociétales progressistes, et continuité dans la politique mémorielle: exhumations en Ukraine, demandes de réparations à l’Allemagne et hommage aux figures de l’histoire nationale.
Nathaniel Garstecka