

Perdre et ne pas se laisser vaincre est une victoire!
L’expérience polonaise de la guerre – un avertissement et une invitation à plus d’unité – écrit Président de la République de Pologne, Andrzej DUDA
.Le 1er septembre 1939, à l’aube, s’est ouvert le plus tragique chapitre de l’histoire de l’humanité. Des raids aériens sur la ville de Wieluń, pourtant sans aucune présence militaire, ont signé le début de l’agression de la République de Pologne par le IIIe Reich allemand. Près de 200 civils innocents tués à coup de bombes, de mitrailleuses et d’incendies. Presque toute la ville anéantie, y compris l’hôpital, bien que signalé par une croix rouge, l’église catholique et la synagogue. Au même moment, le cuirassier « Schleswig-Holstein » a ouvert le feu sur la garnison polonaise de Gdańsk-Westerplatte et des formations terrestres allemandes ont pénétré sur le territoire de la Pologne.
Le bombardement de Wieluń, un crime et un acte de terreur, a commencé une guerre totale où toutes les normes de morale et de droit allaient être piétinées, et où la destruction des ressources de l’adversaire et l’extermination massive de la population civile allaient être appliquées à une échelle jamais vue auparavant. Cette guerre a coûté la vie à 80 millions de personnes, dont plus de 6 millions de citoyens polonais parmi lesquels 3 millions de Juifs polonais. L’immensité des souffrances physiques et psychiques, des pillages et des destructions dans les domaines de la culture, de l’art, de la science et de l’économie restent encore aujourd’hui difficiles à décrire.
La tactique allemande de « guerre éclair » et l’agression de la Pologne par l’Est, de la part d’un allié formel de l’Allemagne nazie qu’était à l’époque la Russie soviétique, ont scellé le sort de ma Patrie. Ayant enduré cinq semaines de combats acharnés, elle est tombée sous l’occupation de deux régimes totalitaires et criminels dont le camp allemand nazi de concentration et d’extermination d’Auschwitz-Birkenau et les goulags – ces camps soviétiques de travail forcé harassant, en Sibérie et ailleurs – sont devenus les symboles pour toujours.
Pourtant, dans les oreilles des patriotes polonais résonnaient toujours ces mots de l’un de leurs héros, Józef Piłsudski : « perdre et ne pas se laisser vaincre est une victoire ». Déjà en septembre 1939, nous avons commencé à former les structures de l’État clandestin polonais : parlement, gouvernement à l’exil, pouvoir judiciaire, éducation, institutions humanitaires (telle la Commission d’aide aux Juifs auprès de la Délégation du Gouvernement au Pays créée dans le but d’aider les Polonais à sauver leurs concitoyens juifs de la Shoah, malgré le risque de peine de mort encouru). L’Armée de l’intérieur (AK), le bras armé de cet « état invisible », a été, en Europe occupée, le mouvement de résistance le plus nombreux et le plus guerrier dont les effectifs en 1944 avoisinaient 390 000 soldats, hommes et femmes.
Les Polonais ont combattu les Allemands sur tous les fronts, de Narvik en Norvège jusqu’à Tobrouk en Libye, des rochers du mont Cassin en Italie jusqu’à la bataille, victorieuse, de Berlin. Nos pilotes se sont illustrés dans la bataille d’Angleterre, nos marins ont couvert les opérations de débarquement des alliés en Normandie et nos formations blindées et parachutistes ont libéré entre autres les Pays-Bas et la Belgique. Rappelons également la précieuse contribution apportée par les Américains d’origine polonaise qui soit ont rejoint les rangs de l’armée américaine ou l’armée polonaise d’Occident en tant que volontaires, soit ont soutenu matériellement nos unités en Europe et les prisonniers de guerre polonais.
.La pensée de Piłsudski invoquée ici avait sa suite : « vaincre et se reposer sur ses lauriers est une défaite ». 80 ans après l’éclatement de la Seconde Guerre mondiale, la communauté des États du monde libre doit rester unie autour de l’objectif de construire un ordre de sécurite pérenne et basé sur le respect réel des droits de l’homme et du droit des nations. Je souhaiterais assurer que la Pologne, inébranlable dans sa détermination et sa fermeté, et en n’oubliant rien des expériences de la guerre, est et restera engagée dans la réalisation de cette tâche.
Andrzej DUDA